Philosophies de l'humanisme


Séminaire (2005-2006) : Marsile de Padoue, Defensor pacis

Séminaire commun CESR, Tours [M1, UE5]- ENS-LSH, Lyon [PHI020]


Ce projet vise à conduire en parallèle deux séminaires consacrés au Defensor pacis de Marsile de Padoue (1324) ; l'un est animé par Laurent Gerbier au CESR (Tours), l'autre par Didier Ottaviani à l'ENS-LSH (Lyon). La plupart des hypothèses examinées auront été élaborées en collaboration étroite, et une journée d’étude organisée en commun (dates et programme à préciser) permettra, à la fin de l’année, de confronter les résultats de travaux menés de part et d’autre. Un Forum privé est ouvert sur ce sujet, réservé aux participants du séminaire, sur le Forum du Cerphi.


Laurent Gerbier, CESR, « Décrire et penser la vie de la cité au XIVe siècle : Marsile de Padoue, Defensor Pacis, prima dictio. »

Séances : vendredi 7 oct 2005, 14 oct, 21 oct, 28 oct, 18 nov, 25 nov, 1er déc, 8 déc et 15 déc, de 14 à 17h.

Argument

Le Défenseur de la paix (Defensor Pacis) de Marsile de Padoue, rédigé en 1324, présente dans son premier discours une description de la cité, de ses fins et de ses parties, qui emprunte ses outils théoriques à l’aristotélisme classique tout en les adaptant aux conditions nouvelles du XIVe siècle. Le séminaire se donne pour but d’examiner la question de la tranquillité civile, qui est le souci central de Marsile dans le premier discours (prima dictio) du Defensor. Cette question permet en effet tout d’abord d’étudier les sources qu’utilise Marsile (aristotélisme arabe ou scolastique, héritage cicéronien, emprunts aux disciplines émergentes que sont le droit et la médecine, etc.). A partir de là, on examinera la description précise des parties de la cité par Marsile, ainsi que leur composition. Pour « défendre la paix », Marsile doit en effet affronter la question de la multiplicité de la cité, qui est lourde de conflits et de divisions préjudiciables à l’unité civile. On verra alors enfin de quelle façon Marsile se saisit ainsi d’une difficulté qui anime la pensée civile du XIIIe au XVIe siècle, et ce dernier point permettra de poser la question de la réception du Defensor, traduit en italien dès 1363 à la demande de la chancellerie de Florence.


Didier Ottaviani, ENS-LSH, « La naissance de la science politique : Marsile de Padoue »

Séances : hebdomadaire, mardi, du 8 nov 2005 au 17 jan 2006, de 14h30-17h30.

Plan

Méthode et objet de la science politique
. L’évolution de la médecine. Il faut d’abord déterminer l’objet de la politique, puis une méthode scientifique, passant par les sciences naturelles et l’aristotélisme. Mais l’ordre politique relève aussi de faits concrets, et il faut s’interroger sur les rapports théorie/pratique. De ce fait, en fonction de ce qu’a fait Pietro d'Abano, faut-il voir la naissance d’une science politique en un sens nouveau ? Lire ensemble Marsile et Pietro, qui fut son maître, permet une redéfinition du statut du modèle biologique pour la formation des cités.
Le modèle biologique. La politique s’occupe de vivants, mais à un degré supérieur par rapport à médecine. Donc, il faut s’intéresser à cette entité vivante qu’est le corps politique, redéfinir le peuple, à partir d'une étude ontologique des rapports matière/forme. L'évolution des cités doit être interprétée analogiquement à partir de l'embryologie médiévale.
L’origine des communautés politiques. Il faut d’abord s’interroger sur l’élément le plus petit de la communauté, l’homme, et sa double destination : vie et vie bonne. Cependant, la cité n’est pas seulement de l’ordre de la nature, mais aussi de la raison, sa genèse doit donc être envisagée à partir de là. Il est donc nécessaire de penser l’origine de la cité, qui est le peuple, et donc doit gouverner en tant qu'il est le législateur premier.
La structure de la cité. Les différentes fonctions ou offices de la cité. Parmi ces offices, la fonction gouvernante est fondamentale et suppose que l’on s’interroge sur le statut du prince. Il faut comprendre ce que c’est que la loi, qui fonde réellement la communauté politique. Mais du fait de la relativité pratique de la loi, malgré son universalité théorique, la question du meilleur régime doit être revue.
De la cité à l’Empire. La question ne peut être traitée que dans le cadre de l’époque, qui voit une cause nouvelle de discorde, le pouvoir pontifical. Cela vient d’une mauvaise compréhension du rôle de la fonction cléricale. Il faut alors s’interroger sur le regnum, et le différencier du sacerdotium. Il faut repenser l’unité, indépendamment du pouvoir spirituel, comme unité temporelle. Cette exigence, et la manière de la traiter révèle une forte influence averroïste chez Marsile, qui suppose l'étude de sa gnoséologie.



Bibliographie restreinte


Marsilio da Padova, Il Difensore della pace [Prima dictio uniquement] (texte latin et traduction italienne), ed. et tr. C. Vasoli, Venise, Marsilio Editore, 1991.
Marsilio da Padova, Il Difensore della pace (texte latin et traduction italienne), intr. et tr. M. Fumagalli Beonio Brocchieri (et al.), Milano, Rizzoli, « BUR », 2 vol., 2001.
Marsile de Padoue, Le Défenseur de la Paix, tr. J. Quillet, Paris, Vrin, 1968.
Marsile de Padoue, Œuvres Mineures [Defensor Minor & De translatione imperii] (texte latin et traduction française), ed. et tr. C. Jeudy et J. Quillet, Paris, CNRS Editions, 1979.


Collectif, Marsilio da Padova. Atti del convegno internazionale di Padova, 1980, in Medioevo, Padoue, Antenore, vol. V (1979) et VI (1980).
Dolcini, C., Introduzione a Marsilio da Padova, Rome-Bari, Laterza, 1995.
Gewirth, A. J., Marsilius of Padova. The Defensor of Peace, Columbia U. P., New York, 2 vol., 1951-1956.
Lagarde, G. de, La naissance de l'esprit laïque au déclin du Moyen âge, vol. III. Le Defensor Pacis, Paris-Louvain, Nauwelaerts, 1970 (éd. revue).
Merlo, M., Marsilio da Padova. Il pensiero della politica come grammatica del mutamento, Milan, FrancoAngeli, 2003.
Piaia, G., Marsilio e dintorni. Contributo alla storia delle idee, Padoue, Antenore, 1999.
Quillet, J., La Philosophie politique de Marsile de Padoue, Paris, Vrin, 1970.