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La philosophie de la lumière chez Dante

Du Convivio à la Divine comédie

Didier Ottaviani
Honoré Champion, Paris, 2004

L'ouvrage peut être commandé en ligne sur le site des éditions Honoré Champion.


Quatrième de couverture

La pensée de Dante se situe au confluent de différentes traditions philosophiques issues de l’antiquité et du moyen âge et trouve son achèvement, non dans ses traités strictement « philosophiques », mais dans les vers du Paradis. Si la forme poétique ne permet pas de restituer intégralement les démonstrations de la pensée rationnelle, celles-ci ne sont pas pour autant absentes de la Divine comédie ainsi que tente de le montrer cette lecture. En soulignant les modifications que subissent les concepts entre le Convivio et le Poème Sacré, il est possible de reconstituer une philosophie qui se place résolument dans le sillage aristotélicien d’une philosophie naturelle, intégrant tout à la fois les traditions grecque, arabe et latine. L’étude de la notion de « lumière », dans sa double acception physique et métaphysique, permet de saisir la richesse et l’originalité de cette pensée, car elle permet d’articuler les différents aspects de l’œuvre en un ensemble harmonieux et cohérent, qui se situe au confluent de l’aristotélisme et du néoplatonisme. Héritier de la pensée médiévale, Dante propose une philosophie nouvelle qui clôt une époque et ouvre sur la Renaissance.


Résumé

La philosophie de Dante trouve son achèvement dans la Divine comédie, dans laquelle la notion de « lumière » joue un rôle central permettant d’harmoniser un héritage conceptuel multiple. Cette notion, progressivement constituée par l’ensemble de l’œuvre, est la clef d’entrée permettant de saisir la nouveauté d’une pensée qui tout à la fois clôt le moyen âge et ouvre sur la Renaissance. Si Dante est l’héritier d’une tradition de pensée chrétienne qui se situe au confluent de l’aristotélisme et du néoplatonisme, il est également le créateur d’une réflexion originale qui se place dans la lignée de la philosophie naturelle aristotélicienne. La philosophie dantesque se décline selon divers points de vue, issus des traditions grecque, arabe et latine, et ne peut être saisie que par l’étude du statut de la lumière, comprise comme un concept capable de se déployer sur différents champs. Contrairement à certaines idées reçues, Dante ne se contente pas de mettre en vers les analyses des philosophes qui l’on précédé ; il les soumet à une interprétation particulière, manifestant ainsi son statut de philosophe authentique. En cherchant à intégrer dans le Poème Sacré des analyses issues de diverses sciences, Dante marque sa volonté de proposer une pensée rationnelle et démonstrative que la forme poétique rend parfois difficile à mettre en évidence. Pourtant, les nombreux passages consacrés à l’astronomie, à la biologie ou à la physique dévoilent les connaissances précises que pouvait avoir le Poète dans ces différents domaines, qu’il parvient à faire fusionner en élaborant une métaphysique générale de la lumière. Proche de la philosophie de Robert Grosseteste, la conception dantesque de la lumière assure l’harmonie des analyses physiques, ontologiques et métaphysiques. Dante peut ainsi convoquer des doctrines aussi hétérogènes que celles d’Albert le Grand, Thomas d’Aquin, Averroès ou Galien, sans pour autant tomber dans la contradiction. En effet, du fait de son équivocité, le concept de « lumière » opère aussi bien dans le champ de la physique, comme lumen étudiée par l’optique, que dans celui d’une métaphysique qui assimile la cause première à une Lux. Ainsi, c’est un Dante se plaçant au confluent du néoplatonisme et de la tradition aristotélicienne arabe que nous avons tenté de mettre au jour, un Poète réalisant la jonction entre le Liber de causis, le Liber de intelligentiis et les différents commentaires arabes et latins des œuvres d’Aristote. En intégrant les acquis de l’aristotélisme grec, arabe et latin, tout en résorbant leurs contradictions, Dante assure la transition entre un moyen âge finissant et une Renaissance encore à venir.