L’ « activité obscure » dans la philosophie de Félix Ravaisson
Claire Marin
Thèse soutenue le 22 novembre 2003
A l’Ecole Normale Supérieure d’Ulm (Salle des Conférences)
Jury : F. Azouvi, J.-F. Courtine, J.-F. Marquet,
F. Worms
Situer Ravaisson dans l’histoire de la philosophie
En prenant pour fil directeur l’étude d’une expression,
celle d’ « activité obscure », qui n’apparaît
que deux fois dans une œuvre d’une quarantaine de pages
De l’habitude, écrite en 1838 par un philosophe
souvent considéré comme mineur, Félix Ravaisson,
ce travail semble présenter tous les aspects caricaturaux d’une
thèse concentrée sur quelques millimètres carrés
de la pensée. Nous avions fait le pari d’inverser cette
perspective minimaliste et de faire de cette expression le point d’ancrage
d’une relecture de la philosophie française de Maine
de Biran à Derrida. Rattrapés par le principe de réalité,
nous avons préféré suivre le déploiement
des sens possibles de cette expression dans l’œuvre de
Ravaisson et dans les échos qu’elle trouve dans certains
écrits philosophiques du XXe siècle français.
Il s’agissait ainsi de faire émerger des liens négligés
entre le spiritualisme et la phénoménologie française,
d’inscrire par là même le spiritualisme dans une
histoire de la philosophie qui oblitère trop souvent son rôle.
L’un des enjeux était de situer l’œuvre de
Ravaisson, dont on souligné parfois pour le desservir la dimension
poétique, dans une histoire de la pensée et des concepts,
quand bien même ceux-ci se voient redéfinis dans leur
combinaison avec l’esthétique.
Mais il semblait également important, dans une démarche
qui reprenait celle de D. Janicaud, de présenter une hypothèse
de généalogie de la pensée française,
en mettant l’accent sur l’information de l’être
par l’habitude et sur ce qu’elle révèle,
à savoir l’importance de l’involontaire, de l’enracinement
du cogito dans l’incarnation, du retour à la vie.
Ainsi la pensée de Ravaisson devait être doublement située
:
- Tout d’abord, dans son époque, notamment dans son rapport
à Maine de Biran, mais aussi à ses contemporains comme
Cousin, Jouffroy, Lachelier
- mais également dans une confrontation avec des approches
du XXe siècle sur les questions de l’affectivité,
la passivité ou la corporéité.
Ainsi, au-delà du passage obligé que constitue le lien
Ravaisson/ Bergson, d’autres auteurs ont été convoqués.
Certains, comme Ricœur et Bruaire, signalent eux-mêmes
l’héritage ravaissonien qui nourrit leur œuvre.
Mais les rapprochements se sont faits parfois plus inédits,
comme le retour de Derrida sur la philosophie française et
notamment sur Ravaisson, ou encore la mise en regard de la philosophie
de Ravaisson avec celle de Michel Henry. A travers ces premiers liens,
d’autres se sont formés. Ainsi, on pouvait suivre par
exemple la question de la cosmologie posée par Ravaisson, reprise
par Ricœur et interrogée de nouveau par Renaud Barbaras.
La mise en évidence de ces différents échos de
thèmes ravaissoniens dans la philosophie française contemporaine,
essentiellement dans sa voie phénoménologique, elle
visait avant tout à souligner les virtualités fécondes
de la pensée de Ravaisson. Baruzi, dans son introduction
à l’Habitude, affirme que Ravaisson libère
la philosophie française de notions incultes de l’esprit
(1). L’enjeu était
en effet de voir comment la philosophie de Ravaisson présentait
en germe des éléments qui s’épanouissent
dans les philosophies ultérieures.
Ainsi nous avons suivi le développement de la pensée
comme celle d’une plante, à travers ses greffes, ses
boutures, ses lignages pour entr’apercevoir le déploiement
de l’arbre philosophique, ou tout au moins d’une certaine
branche de la philosophie française, celle qui précisément
semblait dépourvue d’héritage, puisque réfractaire
au positivisme et méfiante devant la psychologie expérimentale,
elle s’excluait de la mise en place au XXe siècle des
« sciences humaines ». Pourtant, rétrospectivement,
il est possible d’inscrire la philosophie de Ravaisson dans
l’élaboration d’un courant de pensée qui
interroge le sens du retour au corps, à l’affectivité.
Ainsi en sondant des notions comme la sensation, la perception, la
conscience et l’inconscient, le questionnement ravaissonien
offre des points de comparaison et de convergence avec la recherche
phénoménologique en France au XXe siècle.
En s’arrêtant sur des moments de la pensée ravaissonienne,
qui prennent sens dans leur lien ultime avec la métaphysique,
nous avons pris le risque de les isoler et de faire surgir de cette
réflexion du XIXe siècle des concepts contemporains
qu’elle nous semblait esquisser. Le bénéfice d’une
telle démarche était de montrer comment chaque élément
d’un processus réflexif peut constituer un point de départ,
un élément matriciel pour une nouvelle voie herméneutique.
Ainsi, si nous avons choisi les différentes interprétations
de l’activité obscure comme involontaire du corps ou
de la conscience, c’est parce que ces voies ouvraient l’œuvre
ravaissonienne plutôt qu’elles ne la renfermaient sur
elle, et permettaient de tracer des parallèles, là où
l’on a tendance à isoler cette pensée dans une
parenthèse de la philosophie française.
L’expression d’ « activité obscure »,
par sa relative indétermination, élargit l’horizon
des interprétations. Ce n’est pas comme une lacune, mais
véritablement comme profusion de sens que l’indétermination
de cette activité doit être comprise. C’est pourquoi
elle constitue à elle seule un objet de recherche qui appelle
une élucidation. Elle reproduit ce procédé d’une
concentration de sens en une unité restreinte qui caractérise
l’écriture elliptique de Ravaisson. Ce dernier ne cachait
pas son intérêt pour les choses confuses qui stimulent
l’intelligence dans l’effort qu’elles exigent pour
parvenir à l’intelligibilité (2)
.
Notre hypothèse était de faire de l’activité
obscure l’expression centrale en laquelle s’articuleraient
non seulement les différents plans de l’œuvre ravaissonienne,
mais également sa démarche et celle de certains philosophes
qui lui succèdent. Elle répondait ainsi à l’objectif
d’une unification de la philosophie ravaissonienne et permettait
de suivre les pistes interprétatives dégagées
par l’analyse de Ravaisson et réinvesties par certains
philosophes français contemporains.
Idée d’un lien entre l’activité obscure
et l’épreuve de l’être
Mais dans une lecture plus naïve du texte De l’habitude,
l’activité obscure a d’abord évoqué
une conception positive de l’épreuve de l’être.
Par sa forme, sa facture condensée, le texte De L’habitude
résiste et ne livre pas immédiatement son sens au lecteur.
Ce premier défi dans l’appropriation du texte est un
stimulus élémentaire consigné dans toute bonne
éthologie du chercheur. Mais plus profondément peut-être,
c’est l’optimisme de ce texte, dans son affirmation d’une
continuité de l’activité de l’être,
dans sa foi en une puissance d’agir et une capacité à
supporter l’être toujours renouvelée qui a suscité
cette recherche.
Dans une confrontation qui s’est trouvée impérieuse
avec la réalité concrète, le sens de l’activité
obscure a d’abord été pour nous celui de ce nerf
de l’existence, cette énergie vitale, dont la disparition
nous plonge dans une forme d’existence végétative
et triste, dont Maine de Biran décrit les variations méticuleusement,
pour ne pas dire maladivement, dans ses Journaux.
Que se passe-t-il quand notre habitude d’être est radicalement
modifiée par une telle éclipse de l’activité
secrète en nous, créant ainsi une fracture dans l’existence
? Comment se réapproprier cette activité obscure qui
fait soudain défaut ? Cette situation de rupture pose la question
de la force de l’habitude qu’il faut alors réinstaurer
quasiment ex nihilo. Cette rééducation, si
l’on peut dire, met en évidence la puissance de l’habitude
à laquelle, et cela constitue un obstacle épistémologique,
nous nous sommes habitués.
Comment alors re-devient-on familier à soi-même ? Par
la réappropriation de notre puissance d’agir, par l’exhortation
de l’activité en nous, par la redéfinition de
nouveaux pouvoirs, bref par la mise en place d’une dynamique
qui est reconstruction de soi.
Il nous a semblé que cette relation décisive entre l’activité
et l’être se trouvait affirmée dans la philosophie
de Félix Ravaisson. A plusieurs reprises, Ravaisson pose l’équation
de l’être et de l’agir. Certes, Ravaisson n’aborde
pas ce problème par le biais d’interrogations existentielles.
L’idée même d’une disparition de l’activité
n’est pas évoquée, et cette fissure dans l’être
est hors-sujet. En effet, chez Ravaisson, l’activité
obscure ne fait jamais défaut, puisqu’elle est l’expression
de la puissance du divin en nous. Elle est présence métaphysique,
manifestation intime du principe. Elle renvoie ultimement à
une puissance en nous qui nous dépasse, qui est plus nous que
nous, selon l’expression augustinienne. Sa continuité
absolue ne s’accorde donc pas avec l’expérience
d’une faille, d’une discrétion dans l’être.
Toute cette recherche s’appuierait alors sur un malentendu.
Pourtant si cette approche existentielle de l’activité
obscure n’est pas celle que présente Ravaisson dans son
œuvre, cette interprétation subjective signale et stimule
les autres perspectives possibles sur cette question. Il ne semble
pas illégitime d’interroger le sens de cette expression
dans un autre cadre que celui de la métaphysique afin de mettre
à l’épreuve son articulation, non pas seulement
avec une théologie, mais également avec une ontologie.
Au sein du texte De l’habitude, cette expression elle-même
ne surgit pas dans le moment d’explication métaphysique,
qui renvoie cette activité secrète à la présence
dissimulée en nous du principe théologique (II-IV) mais
dans le passage descriptif, dans l’étude phénoménologique
de l’habitude, qui est transformation du mouvement volontaire
en mouvement involontaire, c’est-à-dire effacement de
l’effort (II-II). C’est donc la construction hiérarchisée
du texte-référence qu’est De l’habitude
qui semble autoriser une lecture elle-même graduée de
cette expression.
Aussi, refaisant le cheminement ravaissonien qui conduit, dans sa
philosophie à la source métaphysique, nous avons rencontré
d’autres interprétations, traversé les différentes
strates heuristiques de cette expression.
Ce travail s’est conjugué en trois temps
Partant de l’expérience concrète et familière
de l’habitude, l’étude ravaissonienne introduit
la réflexion dans une zone d’obscurité, celle
de l’involontaire, et présente l’analyse des structures
de la conscience. C’est donc cette plongée dans le «
royaume des ombres »(3) selon
l’expression reprise par Ricœur, et le type d’être
qui s’y rencontre, manifeste, ainsi que la manière dont
je suis saisir cette manifestation obscure, qui nous ont intéressés.
Ainsi l’activité obscure à la fois renvoie à
une expérience, désigne un objet spécifique,
et présuppose pour l’atteindre une méthode.
La recherche s’est donc attachée à trois axes
:
1. une phénoménologie de l’habitude,
qui hérite en partie de la démarche biranienne. Elle
est l’occasion d’une étude de l’involontaire
du corps, comme le souligne en l’approfondissant la reprise
qu’en propose Ricœur dans Le volontaire et l’involontaire
(1950). Soulevant les questions du désir, de l’affectivité,
cette thématique permet de tracer des parallèles avec
les philosophies du retour à l’adhésion sensible,
qui valorisent le rapport à l’incarnation.
2. Une « psychologie », ou plus exactement une
étude des différentes strates de la conscience, qui
reprend la question de l’inconscient, en s’appuyant essentiellement
sur Leibniz et qui pose souligne la nécessité d’une
nouvelle définition des capacités de l’intelligence,
et des prétentions du cogito à atteindre la vérité.
Cette exploration de l’âme pose donc les bases d’une
théorie de la connaissance. Les obstacles épistémologiques
résident moins dans l’obscurité de la chose en
elle-même que dans son obscurité pour nous. Ravaisson
cite de manière récurrente et implicite un passage de
Métaphysique a, I, 10, où Aristote souligne
les limites de notre capacité à comprendre. Comme l’animal
nocturne se laisse aveugler par la lumière du jour, «
notre intelligence est éblouie par les choses les plus naturellement
évidentes ». C’est ce retour au naturellement évident
que l’habitude comme méthode autorise. Ce sont donc d’autres
formes actives de la conscience que son seul exercice rationnel qui
émergent dans cette exploration de la pénombre de l’esprit.
3. Enfin il nous a semblé qu’il y avait dans la philosophie
ravaissonienne la place pour un discours sur l’être dont
nous avons tenté de présenter les différentes
catégories. Par son évanescence, son caractère
fuyant, l’activité obscure est paradigmatique de l’être
lui-même. A côté,ou en deçà d’une
métaphysique, il y a la place pour une ontologie. On peut ainsi
noter qu’il n’y a pas tant chez Ravaisson d’expérience
extatique, de révélation à proprement parler,
comme chez Plotin ou Pascal, mais qu’il y a plutôt l’idée
d’un mouvement asymptotique, d’une tension vers le principe.
Nous nous sommes donc attardés sur cette hésitation
ravaissonienne entre l’affirmation d’une coïncidence
avec le principe dans une intuition et l’idée d’une
tendance vers, d’un rapprochement à l’infini. On
pourrait ainsi présenter l’idée d’une ontologie
de la limite qui se dessinerait comme en deçà de
la métaphysique du toucher dont parle Derrida pour
caractériser la philosophie française et notamment celle
de Ravaisson. Il s’agit de penser en-deçà du contact
direct, dont la figure du toucher est symbolique, l’infinie
tension vers cette union parfaite. Cette ontologie serait pour ainsi
dire une métaphysique dégradée, dans la mesure
où la dégradation s’inscrit selon Ravaisson dans
le cadre d’une hiérarchie des strates de la connaissance.
Elle se comprend alors comme propédeutique à cette métaphysique,
comme préparation du regard à la vision éblouissante
du principe. Le rôle central joué dans la philosophie
de Ravaisson par l’analogie semble témoigner en faveur
de cette interprétation. Ainsi nous avons cru trouver chez
Ravaisson une forme de discours catégorial, qui pallie sinon
l’impossibilité du moins la difficulté d’une
intuition directe de l’être.
Cette sémantique de l’être s’est donc
articulée chez Ravaisson autour des pôles
- Biologique de la métamorphose, conçue comme manifestation
d’une évolution vers la forme idéal
- Mathématique de la différentielle
- Et esthétique du rythme, compris comme réappropriation
du motif originel par sa répétition infinie.
Cette ontologie est alors également le lieu d’une réflexion
sur les limites du langage et de la signification. La spécificité
de la réponse ravaissonienne tient à l’affirmation
du privilège de l’esthétique dans l’approche
du principe métaphysique.
Critiques
Au terme de ce trajet, trois types d’interrogations se dégagent
qui permettraient de poursuivre le dialogue entamé avec la
philosophie ravaissonienne.
- En s’inscrivant toujours dans la démarche qui était
celle d’un déploiement des sens possibles de l’activité
obscure, il faudrait développer le sens que Ravaisson refuse,
celui d’une interprétation organique de l’activité
obscure et étudier le sens qu’elle prend dans une radicalisation
physiologique, dans les philosophies qui pensent un vouloir obscur,
une puissance du corps. Le silence ravaissonien sur les pensées
pourtant contemporaines de Nietzsche et Schopenhauer s’explique
sans doute par le statut prédominant qu’elles accordent
au corps. Il serait alors intéressant de voir comment ce rapprochement
met en évidence la « subtilisation » du corps par
Ravaisson, à comprendre aux deux sens du terme, à la
fois comme désincarnation et confiscation de l’objet-corps
pour la pensée philosophique. Ravaisson refuse en effet la
puissance du corps dès lors qu’elle est dissociée
d’une puissance spirituelle ou tout au moins d’une habitation.
En ce sens, sa pensée est marquée par la doctrine chrétienne.
La loi des membres est loi de grâce.
En opérant ce retour vers une activité obscure comprise
comme support premier de mon existence, au sens physiologique, nous
retrouverions finalement le type d’activité obscure qui
retenait notre attention à l’origine de ce travail, dans
son caractère organique impératif, dans la convocation
du sujet qu’il opère.
- D’autre part et de manière semblable, il conviendrait,
afin de rendre compte plus précisément du moment 1900,
de restituer l’opposition des spiritualistes au courant émergent
de la psychologie expérimentale, menée par Théodule
Ribot. Au-delà du combat institutionnel, c’est bien la
question du statut du corps pour la réflexion philosophique
qui est en jeu dans cette joute intellectuelle dans laquelle Ravaisson
est entraîné plus qu’il n’y participe d’ailleurs
véritablement. Le sens de l’activité obscure s’enracine
alors dans l’organisation nerveuse. C’est de cette opposition
dynamique entre spiritualisme et psychologie expérimentale,
entre psychologie et métaphysique, pour reprendre le titre
de Lachelier que naît la philosophie bergsonienne. Il y a donc
dans cette thématisation de l’activité obscure
par la psychologie de Ribot un maillon de l’articulation entre
les pensées du XIXe et du XXe siècles qui permet de
saisir plus précisément le passage au bergsonisme et
à la phénoménologie. Cette tendance qui cherche
toujours plus profondément la source dynamique dans la corporéité
mériterait d’être suivie dans l’analyse de
la philosophie médicale du XXe siècle.
- Enfin, et dans un même souci d’une lecture diachronique
complétant la perspective adoptée, il faudrait sans
doute revenir sur les derniers textes de Ravaisson, ceux du Testament
philosophique, où Bergson décèle «
l’esquisse inachevée » d’une morale, qui
ne sera pas sans influence sur ses propres écrits, comme en
témoignent les Deux sources de la morale et de la religion.
J. Dopp et D. Janicaud ont également souligné l’intérêt
de cette pensée morale secrète de Ravaisson (4).
Il s’agira de reprendre l’articulation entre la métaphysique
du don et la morale que Ricœur qualifiait de raccourci. Elle
ne se réduit pas comme on a été tenté
de le croire à une simple morale d’imitation. Il faut
voir comment se dessine dans ces textes une morale de la charis,
de la pitié et de la grâce, qui est la traduction dans
notre monde de la métaphysique du don que présente Ravaisson.
Il y aurait chez Ravaisson un souci éthique qui ne doit pas
se laisser réduire à l’image radicale du sacrifice,
mais pose la question du rapport à l’autre et du rapport
à soi. Il faudra donc étudier cette « philosophie
de l’amour »(5) dont
Ravaisson fait le principe de relecture des œuvres plastiques
de l’Antiquité grecque, allant à contre courant
des interprétations classiques. Et la encore, il ne serait
peut-être pas inutile de confronter cette conception de «
l’intelligence du partage » à des questions éthiques
contemporaines.
(1) Baruzi, XXXII : « Par Ravaisson, la philosophie française a été libérée de ce que l’on pourrait appeler une notion inculte de l’esprit ».
(2) « Un moyen d’inventer, disait Léonard de Vinci, est de regarder les choses confuses : l’esprit en dégage des formes et des mouvements, dont à lui seul, il ne se serait peut-être jamais avisé. » « Les monuments funéraires des Grecs », 1880, in L’art et les mystères grecs, p. 198.
(3) Virgile, Enéide, liv. VI, vers 269 : « [Enée et la Sybille] marchaient dans les ombres obscures de la nuit solitaire à travers les demeures vides de Pluton et le royaume des ombres. » (per inania regna)
(4) Dopp, Félix Ravaisson, la formation de sa pensée, p. 322, dernières lignes : « A vrai dire cette morale présente des contours bien indécis. Et peut-être les dernières pensées de Ravaisson que nous livre le Testament philosophique, trahissent-elles un accent nouveau. En elles résonnent en effet un appel au « sacrifice », à l’ « amour héroïque » dont l’objet n’en reste pas moins imprécis, mais où peut-être germe secrètement une nouvelle pensée. »
(5) « Les Grecs et l’au-delà » in Art et les mystères grecs, L’Herne, Paris, p. 201.