Agrégation : Leçons de philosophie
LA PUISSANCE
Bibliographie
Aristote, Métaphysique, Δ,
12 ; Δ, 15 ; Θ.
Aristote, De l'âme, II, 5.
Aristote, Physique, III, 1 ; VIII, 10.
Thomas d'Aquin, Somme contre les gentils, I, 16-20 ; II, 7-22.
Thomas d'Aquin, Somme théologique, I, qu. 77-83.
Leibniz, Nouveaux essais sur l'entendement humain, II, 21.
Leibniz, De la nature du corps et de la force motrice.
Leibniz, Monadologie.
Kant, Essai pour introduire en philosophie le concept de grandeur négative.
Kant, Critique de la faculté de juger, II, B, § 28.
Hegel, Phénoménologie de l'esprit, A, III (Force et entendement).
Nietzsche, La volonté de puissance. [Bien que l'édition
de ce texte par la sur de Nietzsche soit, comme chacun sait, très
discutable, nous le citons car il permet de regrouper provisoirement des fragments
épars dans un ouvrage aisément accessible, qui seront par la
suite modifiés à partir des uvres posthumes (dès
que j'aurai dépouillé tous les fragments)].
Foucault, Histoire de la sexualité, I : La volonté de
savoir, IV, 2.
Introduction
La difficulté relative à la notion de puissance tient dans la
multitude des sens qu'elle peut revêtir, et dont le langage courant,
aussi bien que le langage philosophique, se font l'écho. Est-il possible
de penser, sous un concept unique, des notions aussi diverses que la puissance
conçue comme potentialité, la puissance comme force, qu'elle
soit physique ou politique, ou encore la puissance entendue comme Toute-Puissance
divine, caractéristique du Dieu Créateur ? Afin d'unifier cette
diversité, il est nécessaire de poser tout d'abord une définition
provisoire et très vague, qui permette, par son extension, de recouvrir
tous ces sens. Une direction générale de l'étude peut
être donnée à partir de la notion contraire, l'impuissance,
qui paraît au premier abord plus aisée à connaître.
L'impuissance est une incapacité d'action, et la puissance peut alors
être considérée en retour comme une capacité d'action,
ou, plus généralement encore, comme une "capacité
de...".
Parler de "capacité de..." permet alors de
distinguer une première double acception de la notion : elle peut être
tout à la fois active et passive, être envisagée comme
potentialité et comme acte.
La puissance peut être envisagée comme une potentialité,
selon deux sens. Elle peut être potentielle en tant qu'elle reçoit
son actualisation de l'extérieur, par exemple lorsque je parle de la
matière comme puissance de recevoir des formes. Elle est aussi une
fonction potentielle, capacité de faire ceci ou cela, comme lorsque
je parle de la puissance de sentir, de percevoir ou de penser.
En un autre sens, nous parlons de puissance comme quelque chose qui se manifeste
effectivement, comme un acte, par exemple lorsqu'un gouvernant exerce sa puissance
sur son peuple. C'est aussi comme acte, mais pris en son sens éminent,
que peut être pensée la Toute-Puissance, qui est Acte Pur, sans
aucune potentialité.
A partir de ces considérations préliminaires, plusieurs questions se posent alors :
En tant qu'elle est "puissance de" faire ceci ou cela, ou de recevoir telle ou telle détermination, la puissance se pense selon la catégorie de la relation, et ne semble pas exister par elle-même mais dans son rapport à autre chose, ne tirant sa consistance que de cette mise en rapport. Mais penser la puissance à partir de la relation risque de nous faire manquer une autre acception de ce terme, qui oriente vers une puissance qui puisse exister par soi, même sans se manifester, ouvrant ainsi sur la thématique d'une Toute-Puissance divine qui n'a pas besoin d'entrer en relation pour être. La question est alors de savoir si la puissance peut être pensée totalement à partir de la relation, ou s'il faut toujours mettre cette catégorie sous la dépendance de celle de substance, qui, in fine, l'engloberait. C'est donc aussi, au travers de l'interrogation sur la puissance, le problème de l'antécédence de la substance sur la relation qui est en jeu : la substance est-elle antérieure à la relation ou est-ce le contraire, et, dans les deux cas, quel est le sens que peut prendre le terme d'antériorité ?
Comprise comme potentialité, la puissance semble en dépendance
vis-à-vis de l'acte qui la réalise en la rendant effective,
se voyant repousser vers le non-être, tandis que l'acte seul pourrait
ouvrir sur l'être véritable. Il est alors nécessaire de
s'interroger sur le rapport existant entre la puissance et l'acte : la puissance
reçoit-elle son actualisation de l'extérieur, selon un modèle
artistique ou technique ? Dans ce cas, elle reste, semble-t-il, dans la dépendance
de l'acte qui seul la rend manifeste. Peut-on cependant
ouvrir la puissance sur l'idée de force qu'elle contient, et
tenter ainsi de penser une puissance capable de s'exprimer par elle-même,
qui serait en quelque sorte un "acte embryonné" capable de
se déployer par soi dans le temps ? Ce serait alors donner une autonomie
nouvelle à la puissance, et peut-être même lui permettre
de fonder véritablement l'acte qui alors en dépendrait.
Bibliographie et introduction Première partie Seconde partie Troisième partie et conclusion