Agrégation : Leçons de philosophie


MÉMOIRE ET RAISON


Introduction

En juxtaposant ce couple de concepts, il semble que l'on ait affaire à deux facultés de l'esprit humain. La question première est évidemment celle de leur articulation (mais il est tout à fait probable que l'on doive la dépasser pour envisager de réviser ce statut qu'on leur reconnaît spontanément).
On peut leur donner une caractérisation de travail : le première a rapport avec le sens du temps tel que l'esprit l'appréhende, la seconde avec le calcul et l'ordre. Quel type d'opposition ? D'un côté une faculté passive (la mémoire) et de l'autre une faculté active ? D'un côté une faculté du particulier, de l'autre une faculté du général ?
Mais on est encore trop schématique : d'un côté un matériau est stocké, de l'autre côté une fonction opère. C'est là l'opposition fondamentale. L'essence de l'homme est dans sa raison. La mémoire n'en est qu'une faculté seconde. Mais n'a-t-elle pas, précisément comme faculté du temps, un rôle propédeutique ?
La mémoire conduirait à la raison, en représenterait peut-être les premiers pas. Quoique l'on continue à les hiérarchiser (un effort et son achèvement, une croissance et sa maturité), on est plus proche ici d'une véritable articulation.
Mais cette articulation présente en réalité le défaut central d'adopter implicitement une axiologie contestable : tout ce qui sert l'accomplissement des processus cognitif est bon. La raison est toujours déjà conçue dans ce couple comme la faculté-maîtresse. La mémoire, quelle que soit l'ampleur qu'on lui confère, n'en sera jamais qu'une servante plus ou moins efficace.
Ne faut-il pas alors reprendre le terme de raison lui-même ? Ne faut-il pas l'interroger dans sa duplicité : quelle signification donne-t-on à la raison dans l'homme ? Comment le considère-t-on (en tant qu'il est rationnel, ou en tant qu'il est raisonnable) ? C'est sur le fond de cette équivocité qu'il est peut-être finalement possible de comprendre l'a priori cognitiviste de la première approche du sujet.
On pourra alors se demander si la question posée par le rapprochement de ces deux facultés n'est pas celle de l'ordre même d'une pensée qui peine à se représenter autrement que comme un système atemporel : mémoire et raison pourraient n'être alors que les deux dimensions d'un unique processus de formalisation.



Introduction
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Conclusion